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Dis m’en plus sur : Le projet de Politique de vie nocturne de la Ville de Montréal
Dis m’en plus sur : Le projet de Politique de vie nocturne de la Ville de Montréal

Il est indéniable que la Ville de Montréal est au cœur de la culture et de l’industrie du spectacle vivant au Québec. Elle possède une mosaïque de traditions, de cultures et de langues en plus d’une vie nocturne importante.

Mtl 24/24 a d’ailleurs commandé un rapport en 2023, Creative Footprint (CFP), sur environ 271 lieux de vie et musique situés à Montréal afin de dresser un portrait de sa vie nocturne. L’étude avait notamment souligné que 89% des lieux qui ont été scrutés se trouvent dans ces quatre arrondissements : Ville-Marie, Le Plateau-Mont-Royal, Le Sud-Ouest et Rosemont–La-Petite-Patrie.

Malgré la concentration notable de lieux de diffusions dans ces quartiers, ceux-ci sont sujets aux mêmes règlements en ce qui concerne la vie nocturne, c’est-à-dire les réglementations sur l’alcool, le bruit et les heures d’ouverture des divers commerces et lieux. Afin de remédier à cela, la Ville de Montréal a lancé le 31 janvier 2024 son projet de Politique de la vie nocturne montréalaise.

 

Crédit photo: Mathieu Sparks

 

Les grandes lignes du Projet de Politique sur la vie nocturne à Montréal

Dans l’optique de rendre la vie culturelle de la Ville de Montréal plus dynamique et attrayante, le projet de Politique de vie nocturne souhaite consolider son positionnement de grande métropole et offrir une vie nocturne inspirante, structurante et inclusive afin d’accoter celle de villes déjà reconnues comme Berlin, Amsterdam ou Sydney.

Quand on parle de la vie nocturne, cela correspond à la période de la journée entre 18h et 6h, répartie en trois plages horaires :

  • Soirée : 18h00 à 00h00
  • Cœur de la nuit : 00h00 à 4h30
  • Petit matin : 4h30 à 6h

La vie nocturne inclut les activités dans des endroits comme les bars, les restaurants, les commerces, l’espace public, mais également les espaces de diffusion culturelle tels que les musées, les cinémas et les salles de spectacle.

La Politique sur la vie nocturne à Montréal se déroule sur trois axes :

  1. Consolider les nuits montréalaises
  2. Étendre et développer les nuits montréalaises
  3. Instaurer un modèle de gouvernance adapté et agile

 

À savoir que la Ville participera à la réalisation de la Politique en regard de ses champs de compétences. Puisque la Politique touchera la population montréalaise ainsi que ses organismes et services communautaires, la Ville collaborera avec un ensemble de partenaires économiques et culturels afin de s’impliquer dans la Politique en ajustant leurs pratiques en fonction de leurs champs d’action respectif.

 

Consolider les nuits montréalaises

Ce principe démontre le souhait qu’a la Ville de développer un cadre fonctionnel et réglementaire harmonisé pour la vie nocturne afin de la conserver et de lui donner des bases pour la développer.

Le plus gros changement impliquerait de désigner des zones de vitalité nocturne afin de préserver la tranquillité des quartiers plus résidentiels tout en dynamisant les activités économiques et culturelles nocturnes des secteurs plus propices. Ces zones seront sujets à des changements importants concernant le bruit, la sécurité, la propreté et la mobilité afin d’adapter et harmoniser les cadres réglementaires entourant les activités nocturnes.

L’objectif est d’adopter de meilleures pratiques durant les activités nocturnes, créer un cadre équitable, sécuritaire et inclusif pour tous.tes les usager.ère.s de la nuit en plus de cohabiter harmonieusement avec la population résidente.

 

Étendre et développer les nuits montréalaises

Une fois que les nuits montréalaises seront consolidées, l’objectif du projet est de l’étendre. L’extension de la vie nocturne à Montréal vise l’extension des heures d’ouverture, l’exploitation de permis d’alcool, mais aussi de l’espace occupé ainsi que des éventuelles propositions de projets émises par les promoteur.rice.s de la vie nocturne.

Afin de pouvoir s’étendre, il est important d’intégrer les citoyen.ne.s dans le projet et d’établir des stratégies de concertation pour favoriser un développement harmonieux.

 

Instaurer un modèle de gouvernance adapté et agile

Pour mettre en place les deux axes précédents, un modèle de gouvernance adapté et agile assurera la pérennité de la Politique, en permettant à la Ville d’anticiper, de réagir et de s’adapter aux changements nécessaires tout au long de sa mise en place, et même après son implantation, afin de s’assurer que les objectifs de la Politique soient pris en compte lors de l’élaboration de futurs plans d’actions municipaux, lignes directrices et programmes.

Pour instaurer un tel modèle, la Ville s’assurera d’impliquer les arrondissements et les services municipaux dans la gestion des changements, de stimuler et de maintenir le dialogue avec les parties prenantes en mettant en place une table de concertation sur la vie nocturne avec tous les partenaires et organisations concerné.e.s. De plus, la Ville collectera et archivera des données sur la vie nocturne montréalaise afin d’évaluer les retombées économiques et de documenter ces activités.

 

Actions envisagées à court termes

Le projet vise à travailler sur la vie nocturne dans l’année qui suit sa mise en place. Au court de cette période de temps, trois actions sont déjà envisagées :

  • Développement de zones de vitalité nocturnes
  • Soutien aux salles de spectacles (qui passe par un règlement sur le bruit)
  • Extensions des heures d’exploitation de permis d’alcool

 

Certains aspects du projet ne sont pas encore en action, mais restent prioritaires :

  • Un guichet unique à la vie nocturne
  • Des tables de concertation des partenaires
  • Médiation, mitigation et concertation locale

 

Déroulement des consultations

Avant le dépôt du rapport de consultation au conseil municipal, la Commission sur le développement économique et urbain et l’habitation souhaitait consulter la population montréalaise sur ce projet afin d’entendre leurs opinions et possiblement adopter certaines de leurs recommandations.

Entre la séance publique d’information qui a eu lieu le 13 février 2024 et la séance d’adoption des recommandations qui aura lieu vers la fin du mois d’avril, trois séances d’auditions des opinions ont eu lieu à l’édifice Lucien-Saulnier.

De plus, sur sa page Web Réalisons Montréal, la Ville de Montréal a également mis à la disposition de sa population une Boîte d’idées, où les gens peuvent partager leurs avis publiquement ainsi qu’un sondage où les données retenues restent confidentielles.

 

Commentaires généraux du public

De façon générale, les commentaires du public sont en faveur d’une vie nocturne diversifiée et inclusive. Cependant, plusieurs se questionnent quant à la gentrification, les coûts supplémentaires des services de police et la délimitation des zones.

Certain.e.s s’inquiètent aussi des inconduites qui peuvent survenir en prolongeant les heures d’ouvertures ainsi que des éventuels problèmes de bruits qui pourraient déranger des résident.e.s aux alentours. D’autres mettent de l’avant l’importance d’avoir des zones délimitées claires séparant la vie nocturne et les zones résidentielles afin de non seulement protéger la quiétude des résident.e.s, mais également de préserver la vie nocturne des plaintes reliées au bruit.

De plus, un sujet revenant souvent concerne également la protection des lieux de diffusion et des bars, surtout ceux qui promeuvent la musique indépendante. En effet, de nombreuses personnes mentionnent que plusieurs établissements ne sont pas reconnus comme des salles de spectacles malgré leurs activités et espèrent que des mesures seront prises par la Ville pour soutenir ces lieux de diffusion qui participent activement à la vie nocturne.

 

Crédit photo : Marc-André Dupaul

Implication des SMAQ

Jeudi 14 mars 2024, Les SMAQ était présente lors de la commission permanente de la politique de la vie nocturne à Montréal. Jon Weisz (directeur général), Paola Dugit-Gros (chargée de services aux membres) et Xavier Bordeleau (analyste sectoriel) ont pris la parole pour défendre le rôle des lieux de diffusion indépendants à Montréal en tant qu’espaces communautaires, porteurs de la communauté artistiques, ainsi que vecteurs économiques et touristiques importants.

Durant son intervention, Les SMAQ a présenté une partie de son mémoire qui réaffirme l’importance des lieux de diffusion pour la vie nocturne en tant qu’acteurs économiques et touristiques de la ville en plus de soulever les problèmes auxquels ces espaces  font face. En effet, plusieurs de ces lieux font face à des pressions financières et immobilières comme les augmentations de loyers, pour les lieux n’étant pas propriétaire, ou l’aménagement/l’emménagement de bâtiments voisins qui donnent le jour à un voisinage mécontent du bruits. De plus, le peu de financements disponibles pour ces lieux culturels leur sont souvent inaccessibles à cause de critères d’éligibilité restrictifs. Par exemple, un des critères possibles est le besoin de posséder un permis d’occupation, qui peut s’élever à 45 000$ et prendre du temps avant de savoir si la réponse est positive ou même négative.

À ces soucis, Les SMAQ suggère une feuille de route articulée autour du financement public, du soutien à l’acquisition d’espaces ainsi que d’une modération des normes sur le bruit.

 

Programme d’aide opérationnelle pour les lieux de diffusion montréalais

Calquée sur la demande provinciale de 4 M$ pour un programme similaire à l’échelle provinciale, une enveloppe de 2 M$ annuelle dédiée aux lieux de diffusion montréalais permettrait d’inclure une grande diversité de lieux et de cibler les petites salles indépendantes. Cette aide financière permettrait aussi de reconnaitre leur importance et leur contribution culturelle.

 

Encourager la Ville à soutenir financièrement le rachat des bâtiments abritant les lieux de diffusion

Aider les lieux de diffusion à acquérir les bâtiments où ils sont établis garantirait leur pérennité en plus de les protéger des pressions immobilières qui sont très présentes. Offrir un soutien financier de ce type demande une collaboration entre le secteur privé et public pour développer des fonds d’investissement dédiés au rachat et à la gestion durable de ces espaces culturels.

 

Adaptation du cadre règlementaire autour du bruit dans les arrondissements centraux

Abordé dans le projet de Politique, un cadre réglementaire qui respecterait le désir de quiétude des résident.e.s tout en diminuant les pénalités subies par les lieux de diffusion commencerait d’abord en établissant un seuil de décibels mesurable et adapté. Pour déterminer ce seuil, le recours à des acousticien.ne.s est essentiel pour s’assurer d’établir que le seuil soit adapté selon les arrondissements.

L’adaptation d’un cadre réglementaire autour du bruit nécessiterait également de mettre en place un nouveau système de médiation afin de traiter de manière équitable et efficace les plaintes relatives au bruit. Ce nouveau système de médiation, composé de personnes avec des compétences professionnelles, ajouterait des étapes entre la plainte et l’intervention de la police, enlevant ainsi un poids sur le dos des policier.ère.s en plus d’entamer une discussion entre les résident.e.s et les lieux de diffusion. Cette alternative aux interventions policières demanderait une fonction au sein de l’administration municipale pour veiller à l’équilibre entre les intérêts des lieux de diffusion et de son voisinage.

De plus, l’adoption de l’agent de changement serait un moyen de s’assurer que les nouveaux.elles arrivant.e.s, que ce soit des résident.e.s ou des lieux de diffusion, soit conscient.e.s des activités ayant déjà lieu dans leur nouveau quartier et soit prêt.e.s à s’adapter en conséquence.

 

Conclusion

Les lieux de diffusion montréalais ont besoin de stabilité et de prévisibilité pour assurer leur pérennité et continuer d’être des acteurs vitaux à l’épanouissement de la vie nocturne. Chose certaine, ce projet de Politique de vie nocturne lancé par la Ville est un premier pas dans la bonne direction pour reconnaître l’importance de ces lieux et de mieux les encadrer pour s’assurer que ceux-ci puissent continuer à pratiquer leurs activités sans avoir à craindre de mettre la clé sous la porte.

Malgré les ambitions présentées par le projet de Politique de la vie nocturne, rien n’est encore décidé ou même mis en place. Le dépôt final du rapport de consultation au conseil municipal sera le 13 mai 2024.